< Retour

La prescription des dettes énergie incontestablement fixée à 5 ans

Publié le: 06/09/2017 - Mis à jour le : 08/09/2017

Malgré nos recommandations et celles de nombreuses autres instances¹, le parlement fédéral a approuvé cet été la loi « pot-pourri V » fixant, entre autres, le délai de prescription des dettes énergie à 5 ans. Cette loi est entrée en vigueur le 03 août 2017².

Pour rappel, le délai de prescription est le délai au-delà duquel un fournisseur ne peut plus réclamer une dette à un consommateur. Nous nous étions positionnés en faveur d’un délai plus court et raisonnable de deux ans, sur le modèle des dettes de soins de santé (voir ici notre position et nos recommandations). En effet, l’accès à l’énergie permettant de satisfaire des besoins fondamentaux, il aurait été plus que pertinent qu’une protection particulière soit apportée aux citoyens dans ce domaine. Force est de constater que nous n’avons, malheureusement, pas été entendus par la majorité parlementaire, celle-ci n’ayant pas voté les amendements abondant dans le sens que nous avions suggéré.

Quelles conséquences pour le consommateur d’énergie ?

1. La prescription après un an rendue impossible

Auparavant, et dans la majorité des cas, on considérait déjà que les dettes d’eau, de gaz et d’électricité étaient prescrites après un délai de 5 ans. Toutefois, l’application de ce délai devenait de plus en plus controversée, suite à un arrêt du 8 janvier 2015 de la Cour de cassation attestant, que dans certaines circonstances, le délai de prescription applicable aux dettes énergétiques (gaz et électricité) était d’un an seulement (voir notre news à ce sujet et la jurisprudence). L’invocation de cet arrêt, par des usagers, des travailleurs sociaux ou certains juges³, était très favorable aux consommateurs car il empêchait une accumulation considérable de la dette.

Le législateur a toutefois souhaité mettre un terme définitif à cette controverse.

La loi « pot-pourri V » a précisé très clairement la prescription par cinq ans de dettes dans certains domaines définis, dont l’énergie. En effet, l’article 2277 du Code civil est complété par un alinéa 2, rédigé comme suit : « Les créances pour la fourniture de biens et de services via des réseaux de distribution d’eau, de gaz ou d’électricité ou la fourniture de services de communications électroniques ou de services de radiotransmission ou de radio- et télédiffusion via des réseaux de communications électroniques se prescrivent par cinq ans ».

Cette loi est d’application immédiate pour toutes les dettes en cours.

2. Un point de départ toujours flou

Nous argumentions dans nos recommandations qu’il semblait vain de vouloir fixer un délai de prescription sans préalablement en préciser le point de départ. La nouvelle loi ne précise pourtant pas à partir de quel moment la prescription commence à courir. La jurisprudence propose néanmoins un point de départ à partir de l’échéance de la facture concernée.

3. En quoi est-ce une mauvaise nouvelle (de plus) pour les publics précarisés ?

Comme nous l’expliquions dans nos recommandations, la loi telle que rédigée ne prend pas en compte les spécificités du secteur de l’énergie, de son mode de facturation ou de sa nature de besoin fondamental. L’ensemble des consommateurs sera lésé par un délai de prescription si long mais les implications concernant les personnes défavorisées risquent d’être désastreuses.

Cette loi contient de nombreuses mesures sur des sujets variés tels que le secret professionnel des travailleurs sociaux, la procédure en cas de défaut au tribunal, etc. Nous publierons prochainement un article reprenant les principales modifications en ces domaines et leur impact sur le travail des intervenants sociaux.

[1]L’ asbl Infor Gaz Elec, l’asbl Centre d’Appui-Médiation de Dettes, et le Réseau Wallon pour l’Accès Durable à l’Energie (RWADE)
[2]Loi du 6 juillet 2017 portant simplification, harmonisation, informatisation et modernisation de dispositions de droit civil et de procédure civile ainsi que du notariat, et portant diverses mesures en matière de justice (1)n http://www.ejustice.just.fgov.be/eli/loi/2017/07/06/2017030652/moniteur