< Retour

Une nouvelle ordonnance modifiant le Code bruxellois du Logement « en vue de concrétiser le droit au logement »: quelques nouveautés liées à la problématique énergétique

Mis à jour le : 24/10/2024

Tout d’abord, quant à la philosophie générale, la consécration du droit à un logement décent, à travers l’article 3 du Code bruxellois du logement, est renforcée par l’ajout selon lequel tout logement proposé à la location doit être « doté d’un loyer raisonnable compte tenu notamment des caractéristiques et de l’état du bien ».

Ensuite, la réforme touche à de nombreux aspects généraux de la relation locative, tels que l’élargissement des informations précontractuelles à fournir au candidat-locataire, le cadre régissant la garantie locative, les règles encadrant les baux de courte durée, l’instauration de mécanisme de sanctions des expulsions illégales[1], quelques clarifications quant aux congés, aux assurances, aux modalités de paiement des loyers, … Sans prétention à l’exhaustivité, nous exposerons, au point II., quelques éléments généraux cardinaux du futur nouveau régime en vigueur.

Mais surtout, nous attirons l’attention sur le fait que cette réforme instaure quelques nouveautés liées – à des degrés divers – à la problématique énergétique : une réglementation plus approfondie des charges énergétiques, une consolidation de la lutte contre l’insalubrité, de nouvelles dispositions ayant trait aux travaux à opérer dans un logement, parmi lesquels les travaux destinés à améliorer la performance énergétique de ce dernier. C’est ce que nous abordons au point I..

[1] En Région bruxelloise, une autre réforme est entrée en vigueur le 1er septembre 2023, relative à la procédure d’expulsion locative et l’introduction d’un moratoire hivernal. Sur cette réforme : https://www.socialenergie.be/fr/prevenir-les-expulsions-de-logement-les-nouvelles-balises-de-la-reforme-bruxelloise/ ; https://www.socialenergie.be/fr/turbulences-en-region-bruxelloise-autour-du-moratoire-hivernal-en-matiere-locative/

Quelques nouveautés liées – à des degrés divers - à la problématique énergétique

Les charges (énergétiques) : plus de transparence et règles de rectification en cas d’erreurs

Pour rappel, depuis le 1er janvier 2018, le contrat de bail doit fixer clairement les frais à charge du locataire ou du bailleur, et leur répartition entre les 2 parties. Ainsi, il doit notamment stipuler[1] :

  • Le montant du loyer, ne pouvant en aucun cas englober le montant des charges privatives ou communes ;
  • L’énumération et l’estimation du montant des charges afférentes aux parties privatives et/ou communes qui seront portées en compte au locataire, en mentionnant si les montants réclamés au titre de charges le seront sur la base des frais réels (éventuellement avec versement de provisions périodiques) ou sur la base d’un forfait (présumé couvrir le montant des charges). Il sera également spécifié leur mode de calcul ainsi que le nombre de quotités dans les copropriétés ;
  • L’indication de l’existence ou non de compteurs individuels pour l’eau, le gaz et l’électricité et, le cas échéant, l’indication des numéros de compteurs ainsi que des codes EAN ou de tout autre code d’identification.

Ces éléments font également partie des informations précontractuelles qui doivent être fournies au candidat-locataire (voir Point II.).

Une nouvelle disposition[2] stipule que, sauf dans le cas où il a été expressément convenu que les frais et les charges imposés au preneur sont fixées forfaitairement[3], ils doivent correspondre à des dépenses réelles. Ne sont dues que les dépenses pour des postes libellés explicitement et énumérés limitativement dans le bail, à l’exception de charges exceptionnelles ou nouvelles qui doivent correspondre à des dépenses réelles.Cette disposition s’applique aux baux conclus ou renouvelés à partir du 01/11/2024. Toutefois, pour les baux en cours, l’article 1728ter du Code civil (dont le contenu est similaire), désormais abrogé, est d’application : « § 1. Sauf dans le cas où il a été expressément convenu que les frais et charges imposés au preneur sont fixés forfaitairement, ils doivent correspondre à des dépenses réelles.

Ces frais et charges doivent être mentionnés dans un compte distinct.

Les documents établissant ces dépenses doivent être produits.

Dans le cas d’immeubles à appartements multiples, dont la gestion est assurée par une même personne, l’obligation est remplie dès lors que le bailleur fait parvenir au preneur un relevé des frais et charges, et que la possibilité est offerte à celui-ci ou à son mandataire spécial, de consulter les documents au domicile de la personne physique ou au siège de la personne morale qui assure la gestion. »

À tout moment, chacune des parties peut demander au juge la révision des frais et charges forfaitaires ou leur conversion en frais et charges réels. Le juge statue notamment sur la base de l’évolution des dépenses réelles. Il impose la conversion si elle est possible[4].

Le bailleur devra établir, à chaque date d’anniversaire de l’entrée en vigueur du bail, un décompte distinct des charges de l’année écoulée, qu’il communique au locataire dans les douze mois qui suivent. Les documents établissant ces dépenses devront être produits.
Dans le cas d’immeubles à appartements multiples dont la gestion est assurée par une même personne, l’obligation est remplie dès lors que le bailleur fait parvenir au locataire un relevé des frais et charges, et que la possibilité est offerte à celui-ci ou son mandataire spécial de consulter les documents sans frais. Une mention renseignant cette possibilité doit apparaître explicitement sur chaque élément de facturation communiqué au locataire. La clef de répartition des charges, assortie des explications requises, figure dans le bail. Le changement de clef ne peut se faire que de l’accord des parties[5].

En outre, un régime de rectification, en cas d’erreur dans le décompte des charges, est désormais instauré. Ainsi, la rectification d’une erreur de comptage dans les charges commise en
faveur du locataire pourra être réclamée par le bailleur, dans les 2 ans de l’établissement du décompte, et ne pourra porter au maximum que sur 5 périodes annuelles de consommation. Si l’erreur est en faveur du bailleur, la rectification peut être réclamée par le locataire dans les 2 ans et portera sur l’ensemble des périodes annuelles de consommation concernées par l’erreur[6].

Enfin, en cas de surconsommation consécutive à une fuite d’eau, le tarif appliqué au locataire par le bailleur ne peut pas excéder le « tarif fuite »[7], pourvu que le locataire ait averti le bailleur en temps utile de l’apparition du problème[8].

Observations du Centre d’Appui SocialEnergie (CASE)
Ces nouvelles dispositions sont très positives. Le CASE avait participé aux réflexions – préalables à la rédaction de l’avant-projet d’ordonnance – du cabinet de la Secrétaire d’Etat au Logement par la transmission d’une note, en avril 2021, sur le décompte des charges énergétiques (Décomptes de charges et énergie). De nombreuses suggestions que nous avions émises ont été avalisées.

Quelques précisions pourraient encore être apportées, dans le futur, pour contrer certaines dérives observées sur le terrain :

  • Proscrire les décomptes de charges à une fréquence plus dense qu’annuelle, tels que des décomptes mensuels ou trimestriels ; certains bailleurs tentent d’y procéder et c’est problématique quant à la justesse de ce qui est réclamé ;
  • Stipuler de manière plus claire que lorsque le contrat de bail opte pour des provisions, le bailleur doit faire un décompte qui prend en compte la réalité de la consommation et du coût réel supporté par lui.

Nous rencontrons des situations dans lesquelles le bailleur procède à des décomptes trop fréquents, relève les compteurs pour identifier la consommation « réelle » mais applique un tarif forfaitaire très élevé sur le gaz et l’eau, à savoir plus élevé que le coût réel de ces fluides.

Renforcement de la lutte contre l’insalubrité et élargissement des compétences de la « Direction Inspection régionale du Logement » (DIRL)

(Toutes les dispositions repris dans ce point sont applicables tant aux baux en cours qu’aux nouveaux contrats de bail)

Dès le 1er novembre 2024, la compétence de la DIRL sera étendue aux logements qui n’ont pas encore été ou ne sont plus mis en location, de même qu’à ceux occupés à titre gratuit, alors qu’actuellement seuls les logements loués sont contrôlés[9]. En revanche, les hébergements touristiques (de type Airbnb) et les conventions d’occupation temporaire à caractère social demeurent exclus de la compétence de la DIRL.

Parallèlement, un bailleur qui souhaite vérifier si son bien vacant, qu’il souhaite mettre en location locatif, répond aux normes minimales de qualité, pourra demander une visite de contrôle par les inspecteurs de la DIRL (procédure de certificat de conformité volontaire).

Le nouveau régime prévoit que le locataire qui a porté plainte auprès de la DIRL bénéficiera d’une protection supplémentaire pendant toute la durée de la procédure, grâce à la suspension du congé notifié par le bailleur après le dépôt d’une plainte[10]/[11].

Désormais, il également prévu que peut être présumé non-conforme et interdit à la location le logement du bailleur qui ne collaborerait pas à l’enquête DIRL après 2 demandes de celle-ci[12]. Le Code bruxellois du logement prévoyait déjà cette présomption dans le cas où le bailleur s’opposait à la visite de la DIRL ; mais dès le 1er novembre 2024, la sanction est étendue à toute autre obstruction, telle que la non-communication d’informations (nom du nouveau locataire, d’un éventuel nouveau propriétaire ou bailleur pour les logements gérés par des tiers…).

Relevons également que la conclusion d’un nouveau bail sur un bien faisant l’objet d’une mise en demeure de réaliser des travaux sera interdite, et ce tant que la DIRL n’a pas contrôlé la bonne exécution des travaux imposés (avant ou à l’expiration du délai de la mise en demeure).

Quant aux sanctions, il est désormais prévu qu’en cas de sous-location, la DIRL peut imposer une amende au bailleur principal et/ou au sous-bailleur, en fonction de la nature des infractions constatées.

Enfin, il est stipulé que la commune qui a procédé au relogement ou financé un tel relogement du ou des occupants d’un logement frappé par une interdiction à la location prononcée par la DIRL peut solliciter la récupération des frais exposés auprès du bailleur ou de la personne qui a mis le logement à disposition, sauf si la survenance des manquements aux exigences de sécurité, de salubrité et d’équipement est déclarée en cours du bail par le fonctionnaire dirigeant, après audition du locataire, est manifestement non imputable au bailleur[13].

Il est parallèlement prévu qu’en cas de résolution du bail aux torts du bailleur ou de caducité du bail, et pour autant que l’interdiction à la location soit due à une faute imputable au bailleur, ou encore de nullité du bail pour un motif d’insalubrité, le juge peut imposer au bailleur de prendre en charge le montant des frais de relogement du preneur. Les nouvelles dispositions précisent que ces frais peuvent comprendre :

Les frais d’évacuation du logement ;
2° Les frais de transport du mobilier ;
3° Les frais d’installation dans le nouveau logement ;
4° Le différentiel entre l’ancien loyer et le nouveau loyer à concurrence du loyer non-abusif pour une période maximale de 18 mois[14].

Notons enfin ici 2 ultimes précisions importantes :

  • Est supprimé le « caractère de plein droit » de la nullité ou de la caducité du bail, en cas d’interdiction de mise en location de la DIRL, pour laisser une marge d’appréciation au juge, en lui permettant d’opter pour une solution qui ne provoque pas l’éviction du locataire ;
  • Les jugements prononçant la résolution du bail pour insalubrité sont transmis à la DIRL par les greffes des justices de paix bruxelloises, et enclenchent une enquête dans le chef de la DIRL.

Observations du Centre d’Appui SocialEnergie (CASE)
A nouveau, il faut saluer vivement l’ensemble de ces nouvelles dispositions, qui amélioreront la lutte contre l’insalubrité des logements. L’insalubrité est une problématique étroitement liée à la précarité énergétique, puisqu’un logement salubre et habitable doit notamment comporter des installations électriques et de chauffage conformes et fonctionnelles ; la salubrité impose aussi que le logement ne soit pas atteint d’humidité, dont la cause peut être liée à un mauvais état du bâti qui, même correctement chauffé, se dégrade.

Pour aller plus loin, dans une lecture critique, voyez la note émise par le RBDH dont le Centre d’Appui SocialEnergie de la FdSS est membre.

Nouvelles dispositions ayant trait aux travaux à opérer dans un logement

Dans un contexte de grands chantiers de rénovation du bâti pour satisfaire aux objectifs climatiques, il nous apparaissait important de regrouper quelques nouvelles dispositions ayant trait aux travaux à opérer dans un logement. Celles-ci ont pour vocation de garantir une meilleure protection du locataire.

  1. a) Congé pour gros travaux

Le Code bruxellois du logement prévoit, en cas de bail de 9 ans, qu’à l’expiration du premier et du deuxième triennats, le bailleur peut mettre fin au bail d’un locataire, en donnant congé 6 mois à l’avance, s’il a l’intention de reconstruire, transformer ou rénover l’immeuble en tout ou en partie, à condition que ces travaux :

  • Respectent la destination du bien loué (telle qu’elle résulte des dispositions légales et réglementaires en matière d’urbanisme) ;
  • Affectent le corps du logement occupé par le preneur, et ;
  • Soient d’un coût dépassant 3 années du loyer afférent au bien loué ou, si l’immeuble dans lequel est situé ce bien comprend plusieurs logements loués appartenant au même bailleur et affectés par les travaux, d’un coût global dépassant 2 années de loyer de l’ensemble de ces logements[15].

Dès le 1er novembre 2024, le locataire bénéficiera d’une mesure de protection supplémentaire : le bailleur devra communiquer au locataire, lors de la notification du congé ou au plus tard dans les 2 mois qui suivent :  le permis d’urbanisme qui lui a été octroyé ousoit un devis détaillé ousoit une description des travaux accompagnés d’une estimation détaillée du coût ou un contrat d’entreprise, faute de quoi le locataire peut demander d’invalider le congé. Cette action devra être intentée (à peine de déchéance) au plus tard 2 mois avant l’expiration du délai de préavis. L’intention, ici, est de diminuer les risques qu’un locataire soit évincé de son logement sans qu’il soit par la suite procédé aux travaux.

  1. b) Bail de rénovation[16]: un régime plus protecteur et attractif pour le locataire

Il est désormais explicitement prévu qu’en cas de bail de rénovation, en contrepartie des travaux, le bailleur s’engage en tout état de cause à renoncer à la faculté de mettre fin au bail avant l’échéance contractuellement prévue.

En plus de cet engagement, le bailleur doit, soit renoncer pendant la même période à la faculté de demander la révision du loyer, soit concéder au locataire une diminution ou une remise de loyer : ces renonciations s’imposent, pendant une période déterminée postérieure à la fin des travaux[17].

  1. c) Travaux destinés à améliorer la performance énergétique du logement

L’article 221 du Code bruxellois du logement se lira désormais comme suit ; les modifications entrant en vigueur le 1er novembre 2024 (tant pour les baux en cours que pour les nouveaux contrats de bail),sont mises en évidence, en gras :

« § 1er. Sans préjudice de l’article 1724 du Code civil, et pour autant que le bail ait été conclu pour une durée prévue aux articles 237 et 239, le bailleur a le droit après avertissement du preneur par courrier recommandé au moins un mois l’avance, en cours de bail mais au maximum une fois par triennat, d’exécuter dans le bien loué tous travaux destinés à améliorer la performance énergétique du logement, pour autant que les travaux :
n’aient pas une durée supérieure à celle fixée par le Gouvernement, qui ne peut excéder nonante jours (et non plus soixante) à compter du début des travaux ;
2° puissent être réalisés en site occupé ;
3° n’engendrent pas de réduction de jouissance du logement donné en location après les travaux ; les parties peuvent convenir de façon expresse et au plus tard un mois avant l’exécution de travaux visés à l’alinéa 1er que ces travaux donneront lieu à une augmentation du loyer. En cas de désaccord, la commission paritaire locative peut être saisie pour remettre un avis sur la justesse de cette augmentation ;
4° n’engendrent pas une réduction de jouissance déraisonnable du logement donné en location au cours des travaux ;
5° ne visent pas à mettre le bien en conformité avec les conditions de l’article 219.

« § 2. Pour les travaux destinés à améliorer la performance énergétique du logement, la révision du loyer est proportionnée à l’amélioration de la performance énergétique du bâtiment, au coût supporté par le bailleur et au gain potentiel économisé par le locataire grâce à ceux-ci. Le Gouvernement peut proposer une méthode de calcul de cette révision.
Le nouveau loyer est exigible dès le premier mois qui suit la date de finalisation des travaux.
A défaut d’accord entre les parties sur la révision du loyer, une action peut être introduite devant le juge à tout moment.
Le nouveau loyer est exigible un mois après la finalisation des travaux
. »;

Observations du Centre d’Appui SocialEnergie (CASE)
Autrement dit, l’amélioration de la PEB ne va pas d’office avoir une répercussion à la baisse sur la facture d’énergie du locataire, et alléger son budget sur ce poste. Il faudrait donc penser, quand on envisage l’augmentation du loyer, à des solutions applicables et acceptables pour les locataires dont les économies seront inexistantes.

En conclusion, on ne peut parfaitement déduire d’une mauvaise PEB qu’il y aura d’office des charges élevées, ni d’une bonne PEB que les charges vont diminuer. Outre la problématique de la privation énergétique (qui fait que les charges demeurent peu élevées même si on vit dans une passoire), ou de l’effet rebond (la meilleure PEB ne conduit pas à des baisses de factures car le locataire va consommer comme avant, tout en jouissant d’un meilleur confort thermique). La ministre Fremault avait, durant la législature 2014-2019, affirmé dans le cadre des discussions parlementaires relatives aux travaux énergétiques qu’il était impossible de quantifier l’impact que la performance énergétique du bâtiment aura sur les consommations :

« J’ai également entendu plusieurs questions ou remarques quant aux travaux d’amélioration énergétique des biens tout en notant qu’en réalité, ce qui posait problème à certains, c’était l’absence d’encadrement de l’augmentation de loyer qui y serait liée. Au-delà de toute la thématique sur l’encadrement des loyers, développée il y a quelques instants, cette question a été étudiée en profondeur avant de s’en remettre à la volonté des parties. Rappelons que cet article permet en réalité de réaliser des travaux – pour le bien commun de tous puisqu’il vise indirectement la protection de l’environnement – en cours de bail et en dehors des hypothèses de réparations urgentes. Le bailleur peut à cet égard, à certaines conditions définies dans l’article 221, le faire sans l’accord de son locataire.  Par contre, s’il désire une augmentation de loyer à la suite de ces travaux, légers a priori vu qu’ils ne peuvent entraîner de perte de jouissance déraisonnable, il devra obtenir l’accord de son locataire. À défaut de celui-ci, les parties restent libres, en cours de bail mais à des périodes déterminées, à savoir les triennats, de se présenter devant le juge pour mettre fin à leur différend au niveau du loyer, conformément au système déjà existant. Mais je voudrais tordre le cou à un fantasme, certes attirant sur papier, mais irréaliste en pratique, selon lequel il serait possible de lier parfaitement – et à l’avance – l’augmentation d’un loyer à la diminution des charges dans le chef du preneur. Selon des études de Bruxelles Environnement, pour un même bâtiment de même classe énergétique, se retrouvent régulièrement des consommations allant de une à 10 fois plus élevées selon une série de facteurs n’ayant aucun rapport avec la performance énergétique ! Croire que tout le monde se chauffe et consomme de la même manière, pour de bonnes ou de mauvaises raisons d’ailleurs, est illusoire. C’est de même faire fi des différences de conditions météorologiques, parfois très aléatoires. Des expériences-pilotes dans le sens voulu ont même été menées et se sont révélées très peu satisfaisantes, et en tous les cas fort peu éclairantes dans la construction d’un système où l’augmentation du loyer serait chiffrée. Partant, le choix de s’en remettre à la volonté des parties a semblé le plus cohérent. Rappelons tout de même que des travaux d’amélioration de la performance énergétique, c’est, à terme à tout le moins, un win-win pour tous. J’ai, ici encore, pris bonne note des amendements déposés, notamment par la majorité. Dans la mesure où ceux-ci ne visent pas à chiffrer l’augmentation du loyer mais à la baliser quelque peu, je n’y vois pas d’inconvénient particulier. » (A-488/2, p. 62-63)

[1] Art. 218 du Code bruxellois du logement.

[2] Nouvel article 224/3 § 1er al. 1 du Code bruxellois du logement.

[3] Le forfait est un montant unique payé et censé couvrir les frais, quels qu’ils soient en réalité.

[4] Nouvel article 224/3 § 1er al. 2 du Code bruxellois du logement. Le contenu de cette disposition existait déjà dans le CBL avant cette modification et est donc applicable également aux baux en cours.

[5] Nouvel article 224/3 § 1er al. 3 et 4 du Code bruxellois du logement, applicables aux baux conclus ou renouvelés à partir du le 01/11/2024.

[6] Nouvel article 224/3 § 3 du Code bruxellois du logement, applicable aux baux conclus ou renouvelés à partir du 01/11/2024.

[7] Au sujet de ce tarif :  https://www.vivaqua.be/fr/tarifs-fuites/

[8] Nouvel article 224/3 § 2 du Code bruxellois du logement, applicable aux baux conclus ou renouvelés à partir du 01/11/2024.

[9] Nouvel article 7, § 2, al. 1er, 2° et 3° du Code bruxellois du logement.

[10] Nouvel article 7, § 2, al. 3 du Code bruxellois du logement : « Le locataire, qui a déposé plainte en vertu de l’alinéa premier 2°, bénéficie d’une protection à dater du lendemain de l’introduction de la plainte jusqu’à la décision de l’inspection du logement ou du fonctionnaire délégué. Le congé notifié par le bailleur après le dépôt de la plainte est suspendu pendant la période visée et ne produit ses effets rétroactifs que si le Service d’inspection régionale confirme le caractère conforme du bien visé par la plainte ».

[11] Il en va de même si le locataire a saisi la Commission paritaire locative (CPL) : une protection contre le congé « représailles » est instaurée en faveur du·de la locataire qui solliciterait la commission paritaire locative. Il bénéficiera d’une protection de 3 mois contre un congé, à dater du lendemain de la saisine de la CPL.

[12] Nouvel article 7, § 2, al. 2 du Code bruxellois du logement.

[13] Nouvel article 12/1 du Code bruxellois du logement.

[14] Nouvel article 219 § 6 du Code bruxellois du logement.

[15] Article 237, § 3 du Code bruxellois du logement. Cette disposition s’applique tant aux baux en cours qu’aux nouveaux contrats de bail.

[16] Sur cette notion :  https://www.socialenergie.be/fr/logement/contrat-de-bail-etat-des-lieux-et-responsabilites/le-contrat-de-bail-avec-renovation/

[17] Nouvel article 222 § 5 du Code bruxellois du logement. Cette disposition s’applique aux baux conclus ou renouvelés à partir du 01/11/2024.

Quelques éléments généraux cardinaux du futur nouveau régime en vigueur

Élargissement des informations précontractuelles à fournir au candidat-locataire

Pour rappel, dans sa version actuelle, l’article 217 du Code bruxellois du logement prévoit que les informations précontractuelles suivantes doivent être fournies au candidat-locataire :

« § 1er. Indépendamment de toute autre information requise par des dispositions légales particulières, le bailleur communique au preneur, préalablement et au plus tard à la conclusion du bail, les informations minimales suivantes :
1° la description du logement en ce compris son adresse exacte (rue, numéro, commune, étage, centre ou côté gauche/droit et toute autre donnée permettant d’identifier les locaux loués de manière unique et individuelle) ;
2° le loyer, ne pouvant en aucun cas englober le montant des charges privatives ou communes ;
3° l’indication de l’existence ou non de compteurs individuels pour l’eau, le gaz et l’électricité ;
4° l’énumération et l’estimation du montant des charges afférentes aux parties privatives et/ou communes qui seront portées en compte au locataire, en mentionnant si les montants réclamés au titre de charges le seront sur la base des frais réels (éventuellement avec versement de provisions périodiques) ou sur la base d’un forfait (présumé couvrir le montant des charges). Il sera également spécifié leur mode de calcul ainsi que le nombre de quotités dans les copropriétés ;
5° le certificat de performance énergétique ;
6° le mode de gestion de l’immeuble »
.

Dès le 1er novembre 2024, les nouveaux baux conclus ou renouvelés devront, en outre, mentionner la superficie habitable et le loyer de référence. Et les baux de moins de 3 ans devront, par ailleurs, décrire le type de bail, le montant et la date de versement du dernier loyer appliqué au précédent locataire.

Enfin, en cas de manquement par le bailleur à son obligation générale d’information précontractuelle, le Service d’inspection régionale pourra lui imposer une amende administrative d’un montant compris entre 50 et 200 euros (chaque année, le Gouvernement indexera ces montants). Cette sanction n’entrera toutefois en vigueur qu’en même temps que le Code de mesurage, et au plus tard le premier jour du mois qui suit le délai d’un an à dater du jour de sa publication au Moniteur belge.

Garantie locative : un meilleur encadrement[1]

Dorénavant, la garantie locative ne pourra excéder l’équivalent de 2 mois de loyer (charges non comprises). Pour mettre un terme aux problèmes de preuve de paiement de cette garantie, l’interdiction de remettre la somme en espèces au bailleur est rappelée en identifiant les 5 formes admissibles de constitution de la garantie. Il importe ici de souligner que solliciter une caution personnelle, en plus de la garantie locative, sera interdit dès le 1er novembre 2024 (excepté pour le bail étudiant), tant cela a mené à des abus, auxquels le législateur a souhaité mettre un terme[2].

L’ordonnance prévoit également que lorsque le locataire opte pour un compte individualisé, les intérêts produits sont capitalisés au profit du locataire, et le bailleur acquiert privilège sur l’actif du compte pour toute créance résultant de l’inexécution totale ou partielle des obligations du preneur[3].

Ensuite, le nouveau Code officialise le fait que la garantie (bloquée sur un compte) sert à couvrir « toute obligation locative ». Jusqu’ici, cela dépendait de ce qui était indiqué dans le bail. Dans certains cas, la garantie locative ne pouvait pas couvrir des loyers ou charges impayés, mais juste les dégâts locatifs, par exemple.

Il est désormais prévu que le bailleur doit rembourser la garantie au locataire dans les 2 mois suivant son départ. A défaut, le montant dû est majoré d’une somme égale à 10 % du loyer mensuel, pour chaque période mensuelle entamée[4].

Toujours dans l’idée de cadrer la sortie locative, il est désormais acté que l’état des lieux de sortie devra impérativement intervenir entre la libération des lieux et la remise de clés et dans le mois de la fin du bail[5]. Cette disposition s’applique à tous les baux, y compris les baux en cours.

Bail de courte durée : de nouvelles exigences pour sécuriser le loyer et la stabilité d’occupation

Comme évoqué plus haut, le bailleur qui propose un bail de courte durée (maximum 3 ans) doit signaler le dernier loyer appliqué pour le logement mis en location.

La multiplication des baux de courte durée est limitée à une seule prorogation avec des loyers bloqués (non susceptibles d’augmentation) pendant la durée du bail, sauf indexation prévue contractuellement.

Après une première prorogation, le bail deviendra un contrat de longue durée (bail de 9 ans). Cette mesure est destinée à favoriser la sécurité d’occupation et donc la stabilité.

  1. Des modèles standard de congé et de renon, à valeur indicative, sont proposés de sorte que chaque partie soit correctement informée de ses droits lors de la résiliation du bail[6].
  2. L’ordonnance généralise aussi le principe du contre-préavis en faveur du locataire, offrant ainsi une plus grande flexibilité pour les résiliations de bail.
  3. Expulsions illégales : sanctions et procédure d’interruption[7]

En cas d’expulsion illégale – à savoir une expulsion sans titre exécutoire -, le propriétaire bailleur devra payer une indemnité forfaitaire de 18 mois de loyer au locataire[8]. La même sanction s’appliquera au bailleur qui entrave de manière délibérée et fautive l’accès au domicile du locataire[9].

Par ailleurs, une action en cessation spécifique est introduite : le Président du Tribunal de première instance statuant en référé aura désormais le pouvoir d’ordonner la cessation du comportement litigieux moyennant le paiement d’une astreinte[10]. Si la procédure s’opère rapidement, cela pourrait permettre d’empêcher l’expulsion ou de réintégrer le locataire dans le logement dont il a été illégalement expulsé.

  1. Le locataire sera tenu de souscrire à une assurance contre l’incendie et les dégâts des eaux[11].
  2. Les clauses du bail relatives à l’interdiction de garder des animaux de compagnie[12] ou de se domicilier[13] à l’adresse du bien loué sont nulles.
  3. Toute clause indemnitaire concernant un retard dans le paiement du loyer est prohibée; l’application des intérêts aux taux légaux reste, pour sa part, admissible[14].
  4. Le paiement du loyer et des charges doit être demandé par le bailleur exclusivement sur un compte bancaire, soit par virement, soit par dépôt. Le numéro de compte doit être mentionné dans le contrat de bail et dans toute mise en demeure[15].

Le bailleur demande la réduction de précompte immobilier, à destination des ménages locataires bénéficiaires[16], à la première demande de ces derniers, après avoir reçu les informations pertinentes de leur part. Cette réduction est due à l’occupant présent au premier janvier. Le bailleur en fait profiter le ménage locataire avant l’expiration de chaque année de location, par l’entremise soit d’une réduction de loyer équivalente, soit d’un versement séparé[17].

[1] Les nouvelles dispositions en matière de garantie locative s’appliquent aux baux conclus ou renouvelés à partir du 01/11/2024.

[2] Nouvel article 248 § 2 du Code bruxellois du logement:

 « § 2. Les garanties mentionnées au paragraphe 1er peuvent prendre, au choix du preneur, cinq formes:
1° un compte individualisé ouvert au nom du preneur auprès d’une institution financière agréée par la FSMA;
2° une garantie bancaire résultant d’un contrat-type entre un CPAS et une institution financière agréée par la FSMA;
3° une garantie bancaire auprès d’une institution financière agréée par la FSMA qui permet au preneur de constituer progressivement la garantie;
4° une sûreté réelle auprès d’une institution financière agréée par la FSMA, au nom de locataire.
5° une caution personnelle.
La caution personnelle est autorisée en cumul avec les modes 1° à 4° pour le bail étudiant.
»

[3] Nouvel article 248 § 3 du Code bruxellois du logement.

[4] Nouvel article 249 § 2 al. 2 du Code bruxellois du logement.

[5] Nouvel article 220, §3 du Code bruxellois du logement.

[6] Nouvel article 218 § 4bis du Code bruxellois du logement.

[7] Le nouvel article 233 du Code bruxellois du logement s’applique tant aux baux en cours qu’aux nouveaux contrats.

[8] Nouvel article 233/1 § 1er du Code bruxellois du logement.

[9] Nouvel article 233/1 § 2 du Code bruxellois du logement.

[10] Nouvel article 233/1 § 3 du Code bruxellois du logement.

[11] Nouvel article 220/1 du Code bruxellois du logement, applicable aux baux conclus ou renouvelés à partir du 01/11/2024.

[12] Nouvel article 218 § 5, 12° du Code bruxellois du logement, à lire en combinaison avec l’article 218/1 du Code bruxellois du logement (applicable aux baux conclus ou renouvelés à partir du 01/11/2024).

[13] Nouvel article 218 § 6 du Code bruxellois du logement.

[14] Nouvel article 225/1 du Code bruxellois du logement, applicable aux baux conclus ou renouvelés à partir du 01/11/2024.

[15] Nouvel article 225/2 du Code bruxellois du logement, applicable aux baux conclus ou renouvelés à partir du 01/11/2024.

[16] Au bénéfice des ménages visés par l’article 257 du Code des impôts sur les revenus.

[17] Nouvel article 226 al. 2 du Code bruxellois du logement, applicable aux baux conclus ou renouvelés à partir du 01/11/2024.