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Logement indigne, nullité du bail et indemnités

CATÉGORIE : Relations propriétaire-locataire VECTEUR : Logement TYPE : Justice Année : 2023 Tags :


Résumé général

Dans cette décision, le juge de paix du premier canton de Schaerbeek a statué sur un litige opposant la société SRL V à plusieurs anciens locataires d’un immeuble insalubre situé à Schaerbeek. La société, propriétaire depuis 2019, avait engagé une procédure d’expulsion pour occupation sans droit ni titre. Toutefois, les défendeurs ont prouvé l’existence de baux (écrits ou tacites), reconnus par le tribunal, même si ceux-ci ont été déclarés nuls pour illégalité urbanistique. Le tribunal a retenu que les locataires avaient payé leurs loyers, subi un trouble de jouissance important, et, pour certains, vécu dans des conditions de logement inacceptables. Il a condamné la société à verser des indemnités pour le trouble de jouissance et les frais de relogement, mais a rejeté les demandes d’indemnisation pour expulsion sauvage, estimant que les chambres des défendeurs n’avaient pas été directement concernées par les démolitions. Cette décision met en lumière la nécessité pour les bailleurs d’assurer la conformité urbanistique et la salubrité des logements sous peine de nullité du bail et de devoir assumer les conséquences financières.

Résumé des faits

La société V est propriétaire depuis 2019 d’un immeuble transformé en chambres d’étudiants sans permis d’urbanisme. Plusieurs occupants, dont les défendeurs, y résidaient depuis plusieurs années. En 2022, après une tentative d’expulsion brutale et des démolitions dans l’immeuble, la société a saisi la justice pour obtenir un ordre de déguerpissement. Parallèlement, les locataires ont introduit des demandes reconventionnelles pour obtenir la reconnaissance de leurs droits, la nullité des baux, et des indemnités.

Arguments des parties

La société V affirmait que les défendeurs occupaient les lieux sans titre, ne payaient pas de loyer, et demandaient leur expulsion ainsi que le paiement d’arriérés de loyers.
Les défendeurs, représentés par avocat, soutenaient au contraire avoir conclu des baux avec la société ou ses représentants, avoir payé des loyers, et dénonçaient un logement indigne, des expulsions illégales, et des troubles de jouissance. Ils demandaient le remboursement des loyers, une indemnité pour logement insalubre, une indemnité de relogement et, pour certains, une réparation pour expulsion sauvage.

Raisonnement du tribunal

Le juge a d’abord reconnu l’existence de baux, appuyée par des documents, paiements, et échanges entre les parties. Il a constaté que les logements n’étaient pas conformes aux normes urbanistiques, rendant les baux nuls dès leur origine. Toutefois, les loyers ayant bien été payés, aucune dette locative ne pouvait être retenue contre les défendeurs. Le juge a ensuite établi, sur base des rapports de l’Inspection régionale du logement et de sa propre visite, que les lieux ne respectaient pas les normes minimales de sécurité et de salubrité. Il a donc estimé que les locataires avaient subi un trouble de jouissance, évalué à 175 € par mois d’occupation.

Il a rejeté les demandes pour expulsion sauvage, estimant que les défendeurs n’avaient pas été directement affectés par les démolitions des chambres situées à l’arrière. Il a en revanche accordé une indemnité de relogement forfaitaire de 450 € à chacun des défendeurs.
Enfin, il a débouté V de sa demande reconventionnelle pour loyers impayés, en l’absence de preuves et au vu de son comportement fautif.

Décision du tribunal

Le juge de paix a :

  • Déclaré nuls les baux pour illégalité urbanistique.
  • Rejeté les demandes de V pour arriérés de loyers.
  • Condamné V à verser :
    • 6.125 € à K,  F et R, et 3.500 € à C pour troubles de jouissance.
    • 450 € à chacun des quatre pour frais de relogement.
  • Rejeté les demandes pour expulsion sauvage.
  • Condamné V aux frais de procédure (4.500 €).
  • Déclaré le jugement exécutoire par provision, nonobstant appel.
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