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Consommation hors-contrat et prescription

Publié le: 13/03/2018 - Mis à jour le : 08/01/2019

Nous avons déjà abordé à plusieurs reprises la question de la prescription des dettes énergétiques. Dans cet article, nous focalisons notre attention sur la problématique plus particulière du délai de prescription applicable à la consommation hors contrat, au regard d’une analyse de la jurisprudence.

De quels délais de prescription parle-t-on ? On se réfère au Code civil.

Il existe plusieurs articles du Code civil traitant du délai de prescription et s’appliquant aux dettes énergétiques, dont il est question dans les jugements analysés.

D’une part, l’article 2277 du Code civil, et surtout son nouvel alinéa 2 qui cite explicitement les créances en matière de fourniture d’eau, de gaz et d’électricité, aborde la prescription par 5 ans :

« Les arrérages de rentes perpétuelles et viagères; Ceux des pensions alimentaires; Les loyers des maisons, et le prix de ferme des biens ruraux; Les intérêts des sommes prêtées, et généralement tout ce qui est payable par année, ou à des termes périodiques plus courts, Se prescrivent par cinq ans.

Les créances pour la fourniture de biens et de services via des réseaux de distribution d’eau, de gaz ou d’électricité ou la fourniture de services de communications électroniques ou de services de radiotransmission ou de radio- et télédiffusion via des réseaux de communications électroniques se prescrivent par cinq ans. »

Rappelons que l’ajout de ce 2e alinéa a mis fin à la controverse antérieure qui laissait la porte ouverte à l’application, par certains juges, d’un délai de prescription d’un an (voir notre article à ce sujet).

D’autre part, l’article 2262bis du Code civil, qui traite :

  • d’un délai de prescription général, pour ce qui concerne les actions personnelles, prescrites par 10 ans,
  • et d’un délai dérogatoire de 5 ans pour les actions en réparation d’un dommage fondées sur une responsabilité extra-contractuelle :

« § 1er. Toutes les actions personnelles sont prescrites par dix ans.

Par dérogation à l’alinéa 1er, toute action en réparation d’un dommage fondée sur une responsabilité extra-contractuelle se prescrit par cinq ans à partir du jour qui suit celui où la personne lésée a eu connaissance du dommage ou de son aggravation et de l’identité de la personne responsable.

Les actions visées à l’alinéa 2 se prescrivent en tout cas par vingt ans à partir du jour qui suit celui où s’est produit le fait qui a provoqué le dommage.

2. Si une décision passée en force de chose jugée sur une action en réparation d’un dommage admet des réserves, la demande tendant à faire statuer sur leur objet sera recevable pendant vingt ans à partir du prononcé. »

Nous aurons l’occasion d’expliquer plus en détails pourquoi nous citons cet article ici et pourquoi il pourrait être applicable au cas de figure de la consommation hors contrat.

Que dit la jurisprudence ?

Pour les décisions allant dans le sens d’une prescription de 10 ans, le raisonnement suivi est que, dans le cadre d’une consommation hors contrat, Sibelga n’agit pas comme un fournisseur sur la base d’un contrat (qui tomberait alors dans le champ d’application de l’alinéa 2 de l’article 2272 du Code civil). Les juges mettent donc en avant le fait que la relation entre le consommateur et Sibelga n’est pas d’ordre contractuel, mais repose sur le règlement technique. Par ailleurs, les tribunaux estiment que Sibelga ne réclame pas une créance pour fourniture d’énergie mais bien une indemnité réparant le préjudice lié à une consommation illicite.

Certains juges vont plus loin dans l’analyse pour considérer que le délai de prescription est de 5 ans. Nous disposons de quatre décisions récentes  (les quatre dernières présentées sur cette page). Le raisonnement concernant la qualité de Sibelga, la nature des relations entre le GRD et les utilisateurs est identique. Les juges se basent sur la même référence légale, l’article 2262bis du Code civil, mais ils utilisent l’alinéa suivant (article 2262bis, §1er, alinéa 2), qui prévoit une prescription de 5 ans.

Même s’il peut sembler logique d’appliquer une prescription extra-contractuelle, basée sur la réparation d’un dommage, tous les juges ne se basent pas sur l’alinéa 2 mentionné ci-dessus.

 

» En savoir plus sur les raisonnements utilisés par les juges