Prescription de la dette énergie

Mis à jour le : 13/03/2018

Depuis l’entrée en vigueur de la loi « pot-pourri V » le 03 août 2017,  le délai de prescription des dettes énergie est fixé à 5 ans¹. Cela signifie que le fournisseur ou le gestionnaire du logement ne peut, en principe, pas réclamer le règlement des dettes de gaz et d’électricité dont la facturation remonte à plus de 5 ans.

Auparavant, et dans la majorité des cas, on considérait déjà que les dettes d’eau, de gaz et d’électricité étaient prescrites après un délai de 5 ans. Toutefois, l’application de ce délai devenait de plus en plus controversée, suite à un arrêt du 8 janvier 2015 de la Cour de cassation attestant, que dans certaines circonstances, le délai de prescription applicable aux dettes énergétiques (gaz et électricité) était d’un an seulement² (voir la jurisprudence). L’invocation de cet arrêt récent était  très favorable aux consommateurs car il empêchait une accumulation considérable de la dette.

Le législateur a toutefois souhaité mettre un terme définitif à cette controverse.

La loi « pot-pourri V » a précisé très clairement la prescription par cinq ans de dettes dans certains domaines définis, dont l’énergie. En effet, l’article 2277 du Code civil est complété par un alinéa 2, rédigé comme suit : « Les créances pour la fourniture de biens et de services via des réseaux de distribution d’eau, de gaz ou d’électricité ou la fourniture de services de communications électroniques ou de services de radiotransmission ou de radio- et télédiffusion via des réseaux de communications électroniques se prescrivent par cinq ans ».

Cette loi est d’application immédiate pour toutes les dettes en cours.

Attention : Ce délai peut être interrompu ou suspendu pour de nombreuses raisons, expliquées ci-dessous. La dette qui remonte à 5 ans ou plus n’est donc pas automatiquement prescrite.

Interruption du délai de prescription : le compteur est remis à zéro

Le délai est interrompu et le compteur est remis à zéro, si l’une des situations suivantes est rencontrée :

La personne ayant une dette3:

    • signe une reconnaissance de dette, ou
    • demande un/des délais de paiement, ou
    • paye une partie de la dette

Le créancier (dans notre cas, le fournisseur ou le gestionnaire du logement), via un huissier de justice4 :

    • envoie une citation en justice, ou
    • envoie un commandement de payer, ou
    • procède à une saisie

Dans ces différents cas de figure, un nouveau délai de prescription de 5 ans recommence donc à courir à dater, par exemple, de la signature de la reconnaissance de dette, du paiement d’une partie de la dette, ou encore, de la citation en justice,…

En revanche, une simple mise en demeure du client par le fournisseur (par courrier recommandé) n’interrompt pas la prescription.

Suspension du délai de prescription : pour provoquer un règlement à l’amiable ?

Depuis juillet 20135, une mise en demeure envoyée par un avocat ou un huissier de justice peut suspendre temporairement le délai de prescription.

Cette démarche peut s’avérer favorable à l’usager ayant une dette car une telle mise en demeure peut l’inciter fermement à payer. Cela lui évite ainsi les frais de procédure liés à une citation en justice à laquelle le fournisseur ou le gestionnaire du logement « impatients de récupérer leur créance » auraient pu recourir directement.

La mise en demeure doit remplir plusieurs conditions6 :

  1. La mise en demeure doit être envoyée par recommandé au domicile de l’usager ;
  2. Le recommandé doit contenir les mentions suivantes :
    • les coordonnées du créancier (celui qui réclame la dette)
    • les coordonnées du débiteur (celui qui doit payer la dette)
    • la description de l´origine de la dette
    • le décompte détaillé (principal, frais et intérêts)
    • le délai de paiement avant la prochaine démarche de récupération de la dette
    • l´éventualité d´une procédure en justice
    • l´effet interruptif de la prescription de la mise en demeure
    • la signature de l´auteur de la mise en demeure (avocat, huissier, délégué syndical)

L’envoi de cette mise en demeure fait démarrer un nouveau délai d’un an. Le délai de prescription ne peut être suspendu qu’une seule fois. Si la durée de prescription initiale n´est toujours pas atteinte au terme de ce délai d´un an, le délai de prescription reprend au moment où il avait été interrompu.

Exemple : « si vous recevez après 2 ans une mise en demeure de l´avocat de votre fournisseur, le délai de prescription est interrompu. Un nouveau délai d´un an commence alors à courir. Lorsque ce délai d´un an se termine, votre fournisseur pourra encore réclamer le paiement de sa facture pendant 3 ans puisque le délai de prescription initial (5 ans) n´était pas totalement écoulé lorsque vous avez reçu la mise en demeure »7.

Si au moment de l’envoi de la mise en demeure, le délai de prescription restant est inférieur à un an, la durée de la suspension est identique à celle du délai de prescription restant.

Dans les faits, le délai de prescription des dettes énergétiques est probablement souvent équivalent à 6 ans. En effet, le recours à cette pratique de suspension doit être fréquent tant elle est profitable tant au fournisseur qui s’assure de récupérer la dette qu’à l’usager qui ne doit pas payer les frais d’une procédure contentieuse.

Source : Droits Quotidiens

[1] Loi du 6 juillet 2017 portant simplification, harmonisation, informatisation et modernisation de dispositions de droit civil et de procédure civile ainsi que du notariat, et portant diverses mesures en matière de justice (1)n http://www.ejustice.just.fgov.be/eli/loi/2017/07/06/2017030652/moniteur
[2] sur la base de l’article 2272 du code civil
[3] Art. 2248, Code Civ.
[4] Art. 2244 et 2246, Code Civ.
[5] Loi du 23 mai 2013 modifiant l’article 2244 du Code civil pour attribuer un effet interruptif de la prescription à la lettre de mise en demeure de l’avocat, de l’huissier de justice ou de la personne pouvant ester en justice en vertu de l’article 728, § 3, du Code judiciaire
[6] Art. 2244 et 2246, Code Civ.
[7] Source : Droits quotidiens, http://www.droitsquotidiens.be/base-de-donnees/quel-est-le-delai-de-prescription-de-mes-factures-de-gaz-et-d-electricite.html