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Comment mieux lutter contre la précarité énergétique ?

Publié le: 11/04/2023 - Mis à jour le : 12/04/2023

En revalorisant le Fonds Gaz et électricité et en multipliant les actions préventives des CPAS !

La Plateforme belge de lutte contre la précarité énergétique, composée des différents acteurs privés et sociaux concernés par cette problématique[1], rend publiques deux études intéressantes, en plus du nouveau Baromètre[2] :

  • La première étude porte sur la revalorisation du montant du Fonds Gaz et Électricité et l’amélioration du fonctionnement de ce Fonds[3] ;
  • La seconde étude recense différents projets menés par les CPAS pour prévenir la précarité énergétique[4].

Au sujet du Fonds Gaz et Electricité 

Le Fonds Gaz et Électricité a été créé en 2002 pour apporter une aide dans le cadre de la fourniture d’énergie aux personnes les plus démunies.

Le Fonds a un double rôle :

  • Intervenir financièrement, via les CPAS, pour les personnes qui ne peuvent pas payer leurs factures d’énergie (rôle curatif) ;
  • Soutenir les CPAS pour accompagner ces personnes, afin de leur éviter de tomber dans une situation de précarité énergétique (rôle préventif).

L’utilité du Fonds est unanimement reconnue.

Les experts de la Plateforme considèrent qu’en vue de refléter l’évolution réelle de la facture d’énergie et des besoins des ménages, une augmentation substantielle du budget du Fonds Gaz et Électricité est toutefois nécessaire.

Ainsi, concrètement :

  • A la suite de son indexation en 2022, le Fonds s’élevait à un montant annuel de 62,9 millions d’euros. Au regard de la crise, 16 millions d’euros y ont été ajoutés, à titre exceptionnel. Les experts de la Plateforme estiment toutefois que le Fonds aurait dû être doté de 126,8 millions d’euros pour 2022 ;
  • A la suite de son indexation en 2023, le Fonds s’élève à un montant de 66,6 millions d’euros à épuiser en 2023, auxquels s’ajoutent exceptionnellement 37 millions d’euros, dans le cadre de la crise énergétique. A nouveau, les experts estiment que ces montants sont sous-évalués et que le Fonds aurait dû être doté de 136,9 millions d’euros pour 2023.

En plus d’une revalorisation purement financière, d’autres constats sont soulignés par la Plateforme de lutte contre la précarité énergétique sur l’utilisation du Fonds Gaz et Électricité. Ainsi, parmi les constats, nous relèverons les suivants :

  • Il existe des problèmes structurels propres à l’organisation du Fonds Gaz et Électricité : ainsi, notamment, il faudrait communiquer les budgets disponibles le plus tôt possible aux CPAS, afin de leur permettre de se projeter sur du long terme ;
  • Le public ciblé par le Fonds Gaz et Électricité évolue car les ménages de la classe moyenne sont également touchés par la crise énergétique[5];
  • Et surtout, les mesures curatives (paiement des factures d’énergie) prennent, à regret, la priorité dans la répartition des montants du Fonds Gaz et Électricité, aux dépens des mesures préventives (mesures permettant de faire baisser la consommation d’énergie).

En conclusion de leur étude, les experts rappellent que les mesures préventives peuvent porter sur 3 dimensions :

  • L’amélioration de la qualité du logement qui, selon le CASE, est incontestablement la plus cardinale ;
  • L’utilisation d’électroménagers à basse consommation au sein du foyer ;
  • La conscientisation des ménages à l’adoption de comportements adéquats.

Les experts de la Plateforme estiment toutefois que les mesures préventives liées à la qualité du logement sortent des missions initiales des CPAS. En revanche, des synergies constructives entre les organismes tels que « les Maisons de l’énergie » en Wallonie, « Energiehuis » en Flandre ou « Homegrade » en Région de Bruxelles-Capitale, et les CPAS, devraient voir le jour : cela permettrait d’assurer une continuité dans l’accompagnement et de répondre aux besoins spécifiques des ménages en situation de précarité.

De l’analyse à l’action : au sujet des actions préventives menées par les CPAS

Dans sa seconde étude, la Plateforme de lutte contre la précarité énergétique a cartographié une série d’initiatives portées par les CPAS, et financées en partie par le Fonds de Gaz et Electricité, pour prévenir la précarité énergétique. L’objectif de cette étude est le suivant : valoriser les bonnes pratiques existantes et inspirer d’autres acteurs de terrain.

Les 141 projets existants, recensés au sein des CPAS, s’articulent autour de trois piliers :

  • La sensibilisation : journée ou semaine de l’énergie, guichet de l’énergie, sessions d’information sur des thématiques propres à l’énergie… ;
  • La formation : sensibilisation et formation des acteurs tiers, atelier énergie, atelier facture d’énergie (‘Comparons malin’), etc. ;
  • L’action : audit énergétique, accompagnement dans les démarches administratives, accompagnement pour la réalisation de travaux, prêt de rénovation à remboursement différé, aide financière partielle ou totale lors de l’achat d’un appareil électroménager[6], distribution de kits énergie[7],…

Parmi les actions du CPAS, on recense également le financement de l’entretien d’une chaudière qui est très important pour :

  • Éviter les pannes l’hiver et prolonger la durée de vie de la chaudière ;
  • Réduire les dangers liés au monoxyde de carbone ;
  • Augmenter le rendement de la chaudière.

Les CPAS relèvent en effet que l’entretien d’une chaudière représente un certain coût, parfois difficile à assumer pour les ménages en risque de précarité énergétique. Une aide financière peut être apportée afin d’aider les ménages dans cette dépense ; un accompagnement technique peut également être fourni.

[1] Pour rappel, la Plateforme belge de lutte contre la précarité énergétique est gérée par la Fondation Roi Baudouin. Cette Plateforme rassemble les différents acteurs concernés autour des problématiques liées à l’énergie : fournisseurs et distributeurs d’énergie, régulateurs, associations de lutte contre la pauvreté, fédérations des CPAS, représentants des consommateurs.trices, ombudsman, académiques. Le Centre d’Appui SocialEnergie participe activement aux travaux de la Plateforme, tant sur la précarité énergétique que sur la précarité hydrique.

[2] Ce dernier fera l’objet d’un article distinct.

[3] Pour consulter l’étude, cliquez sur : https://media.kbs-frb.be/fr/media/10493/2023_Revalorisation%20Fonds%20Gaz%20Electricit%C3%A9%20DEF

[4] Pour consulter l’étude, cliquez sur : https://media.kbs-frb.be/fr/media/10525/PUB_3902_ProjetsGazElect_2023_FR_DEF

[5] La Plateforme souligne que de plus en plus de personnes ont des difficultés ou sont dans l’impossibilité de payer leur facture d’énergie suite à la crise énergétique. C’est aussi le cas de la classe moyenne. Avant la crise déjà, une proportion importante de ménages issus de la classe moyenne étaient touchée par la problématique. C’est ce que met en évidence le dernier Baromètre de la précarité énergétique publié par la Fondation Roi Baudouin, dont les données portent sur 2021. Plus d’un tiers (36,6 %) des ménages de la classe moyenne ‘basse’ (dont les revenus équivalents se situent entre 15.510 € et 20.683 €) et 8,2 % des ménages de la classe moyenne ‘centrale’ (dont les revenus équivalents se situent entre 20.683 € et 31.025 €) vivaient, en 2021, en situation de précarité énergétique. Globalement, 13% des ménages de la classe moyenne sont en précarité énergétique. Avec la crise de l’énergie au zénith en 2022, nul doute que la situation s’est aujourd’hui encore considérablement aggravée.

[6] L’idée clé est que la prévention de la précarité énergétique peut s’opérer en améliorant l’efficacité énergétique des appareils utilisés au sein du foyer. Cependant les appareils électroménagers économes en énergie sont bien souvent plus chers que des appareils moins économes, renforçant le cercle vicieux de la précarité énergétique. Une aide financière partielle ou totale lors de l’achat d’un appareil électroménager permet aux ménages en situation de vulnérabilité : de remplacer leurs vieux appareils qui ont une consommation en énergie plus élevée et donc de réduire leur facture d’énergie par après, ou de permettre l’acquisition d’un produit essentiel pour le ménage afin d’augmenter leur qualité de vie.

[7] Le « kit énergie » est un pack distribué par les CPAS lors d’une activité, ou sur demande. Il est composé d’une panoplie d’équipements pouvant aider les ménages à réduire leur consommation d’énergie et par conséquent, faire des économies comme par exemple, un thermomètre, un boudin de bas de porte, un plaid, des ampoules économiques/LED, un pommeau de douche économique, … En plus des équipements matériels, ces kits sont complétés avec des dépliants sensibilisant les ménages à réduire leur consommation d’énergie.